Utilisateur:Firleiouwka/Brouillon Masochiennes

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Pour Paul-Laurent Assoun, les Masochiennes sont les femmes qui, souvent douées d’une personnalité exceptionnelle, violentes ou en donnant l’image, et ayant défrayé les chroniques, ont souvent mis à genoux les hommes forts de l’histoire et l’intelligentsia de l’humanité. À ce titre elles sont de nature à nourrir l'imaginaire et le fantasme masochiens.

Lou Andreas-Salomé[modifier | modifier le code]

Sacher-Masoch et Fanny von Pistor
Lou Andreas-Salomé, Paul Rée et Friedrich Nietzsche

L'historien Bernard Michel établit un parallèle entre d'une part la photo de 1869, représentant Leopold von Sacher-Masoch en compagnie de Fanny von Pistor, vêtue de fourrure et armée d'un fouet, et d'autre part la photo de 1882 représentant Lou Andreas-Salomé, elle aussi armée d'un fouet improvisé avec une branche de lilas, et attelant Friedrich Nietzsche et le médecin Paul Rée à une charrette[1].

À ce sujet, Paul-Laurent Assoun écrit « Ainsi émerge une esthétique masochiste, "paradigme" dont la fameuse photographie de la charrette où Lou Salomé agit une branche de lilas en guise de fouet symbolique sur ses "adorateurs" Nietzsche et Rée fournit l'autre exemple »[2].

Catherine II de Russie[modifier | modifier le code]

Portrait of Catherine II (Fedor Rokotov)

« C'est par un véritable coup d'État, on le sait, qu'elle arrache le pouvoir à Pierre III, se faisant acclamer par la garde (1762), le réduisant, selon le mot de Frédéric II qui prend toute sa signification dans l'imaginaire masochiste, à "un enfant qu'on envoie se coucher", avant de le faire assassiner. C'est à ses pieds de despote éclairée que s'agenouille l'intelligentsia européenne. C'est elle qui noie dans le sang les révoltes et réalise, sous le surnom de "Catherine le Grand", l'expansion de l'empire russe rêvé par son prédécesseur Pierre le Grand »[3]

Messaline[modifier | modifier le code]

L'impératrice romaine Messaline est restée dans l'histoire tant de par son appétit sexuel que de par sa cruauté. Sur son intervention, de nombreux courtisans furent éliminés par la relégation, l'exil ou l'assassinat[4]

« Sans doute est-ce la mention de Messaline qui est la plus prégnante : “ [...] l’impériale et enivrante courtisane de Suburre [...][75] ” est érigée en archétype. Des gladiateurs, l’impératrice avait la réputation de les rejoindre nuitamment, parfois de les faire exécuter. Nulle surprise à ce que, dans les œuvres de Sacher-Masoch, figurent les mêmes référents : Catherine II, Dalila tuant Samson, Judith décapitant Holopherne, Messaline naturellement, autant de référents interchangeables et exprimant la tyrannie féminine et la molestation du corps masculin »[5].

Judith[modifier | modifier le code]

Judith décapitant Holopherne (Le Caravage)

Dans les récits bibliques, Judith, jeune veuve, émancipée des hommes, va empêcher Holopherne d’attaquer le peuple juif.

Elle quitte Béthulie pour rejoindre le camp ennemi, coiffée, parfumée et habillée de toutes ses parures de séduction.

Attirant tous les regards, elle se voit invitée par Holopherne à rejoindre sa tente. Une fois ce dernier endormi, enivré par un repas bien arrosé, elle prend son épée et le décapite. Elle charge ensuite sa suivante d’embarquer la tête d’Holopherne dans son sac[6].

Roxane[modifier | modifier le code]

Roxane de Bajazet (Pauquet)

Sultane de la tragédie Bajazet de Racine, fascinée par l'idée de la mise à mort de l'être aimé, Roxane fera exécuter l'élu de son cœur après avoir échoué à éliminer ses rivales[7].

« C'est alors que le grand vizir, s'étant décidé à passer à l'action, entre au sérail avec ses hommes d'armes pour faire monter Bajazet sur le trône. Atalide, tout comme Acomat, cherche à savoir ce qu'il advient de lui. On apprend que, malgré une héroïque résistance, il vient d'être tué sur l'ordre de Roxane qui est elle-même poignardée par le fidèle Orcan, qui avait reçu d'Amurat, qui était au courant de tout, l'ordre secret de l'exécuter après Bajazet »[8]

Selon Paul-Laurent Assoun, cela fait d'elle « l'image la plus sauvage de la féminité racinienne, et c'est à ce titre qu'elle fonctionne dans l'imaginaire masochien »[9].

Lola Montès[modifier | modifier le code]

Portrait à l'huile de Lola Montez par Conrad Kiesel (de).

L'histoire de ses nombreuses frasques commence lorsque, lors des grandes manoeuvres de Berlin, son cheval s'emballe et l'entraîne dans la suite des souverains : interpellée par un gendarme, elle cravache le visage de ce dernier. Plus tard elle déchirera le procès-verbal d'assignation sous les yeux de l'huissier venu le lui délivrer[10].

« Lola Montès sème une traînée de "soufre" qui culmine dans tel épisode propre à agir sur l'imagination masochienne [...] Là culmine son prestige dans l'imaginaire masochien, faisant d'un souverain son "jouet", mettant en jeu son trône pour sa fatale "Lolita" »[11].

Célébrité médiatique avant l'heure, courtisane et, à ce titre, maîtresse de Louis Ier après avoir été entre autres celle de Franz Liszt et d'Alexandre Dumas fils, les faveurs qu'elle reçoit provoqueront la révolution en Bavière jusqu'à l'abdication du roi au profit de son fils, Maximilien II[12].

Paul-Laurent Assoun analyse que dans cette étape de l'histoire culmine le prestige de Lola Montès dans l'imaginaire masochien[13].

« Lola Montès était une charmeuse. Il y avait dans sa personne un je ne sais quoi de provocant et de voluptueux qui attirait. Elle avait la peau blanche, des cheveux noirs ondoyants comme des pousses de chèvrefeuille, des yeux indomptés et sauvages et une bouche qu'on aurait pu comparer alors à une grenade en bouton. Ajoutez à cela une taille lancinante, des pieds charmants et une grâce parfaite. Par malheur elle n'avait, comme danseuse, aucun talent. »

— Gustave Claudin[14]

Madame Pompadour[modifier | modifier le code]

« Ce qu’il y a de curieux, c’est que dans sa fureur elle prétendait que sa vie était menacée, que le ministre voulait l’empoisonner, comme on s’était amusé à dire qu’il avait empoisonné Mme de Châteauroux. Le roi n’y put tenir, et Maurepas fut exilé à Bourges. Il avait été précédé dans la disgrâce par le contrôleur-général Orry, par le marquis d’Argenson, le rugueux et patriote ministre des affaires étrangères; il fut suivi par le comte d’Argenson, par M. de Machault lui-même, qui, après avoir été du parti de la favorite, s’était tourné contre elle. Ils y passèrent tous, et Mme de Pompadour resta seule souveraine et dominatrice avec des ministres de son choix, Bernis, puis le duc de Choiseul »[15].

Marguerite de Valois[modifier | modifier le code]

De par sa soif de pouvoir qui l'unit à Henri de Navarre, la « Reine Margot » est considérée comme intrigante et voluptueuse, de sensibilité masochienne selon Paul-Laurent Assoun[16]. Par ailleurs, elle se fera remettre la tête de son amant après l'exécution de ce dernier.

La reine Zénobie[modifier | modifier le code]

Le dernier regard de Zénobie sur Palmyre (Herbert Schmalz)

Sacher-Masoch a surnommé sa tante du nom de la reine Zénobie de Palmyre du simple fait qu'elle fut une femme de pouvoir autonome, et que dans son imaginaire les femmes de pouvoir étaient toujours très belles. « Dans La Sirène, elle apparaît sous les traits de Zénobie, « souveraine et coquette », bouleversant une famille patriarcale, inspirant aux femmes de la maison le désir de dominer, asservissant le père, coupant les cheveux du fils dans un curieux baptême, et travestissant tout le monde »[17].

« Reste la scène vécue qui reste à l’état de rêve dans les Souvenirs. « Ma tante Zénobie était remarquablement belle, une apparition éblouissante, une femme qui unissait la majesté d’une Catherine II de Russie au charme et à la grâce d’une Ninon de Lenclos. Elle était grande et admirablement faite, svelte, tout en ayant des formes opulentes. Elle était fière, aimable, en un mot irrésistible... » »[18]

Références[modifier | modifier le code]

  1. Bernard Michel, Sacher Masoch, Robert Laffont (ISBN 2-221-05617-5), p. 157
  2. Paul-Laurent Assoun, Le couple inconscient, Anthropos (ISBN 2-7178-2220-8), p. 104
  3. Paul-Laurent Assoun, Le Couple inconscient, Anthropos (ISBN 2-7178-2220-8), p. 121
  4. « Orgies, complots adultères... Qui était Messaline, "l'impératrice scandaleuse" ? », sur RTL, (consulté le )
  5. Pascal Noir, Aux pieds d'Omphale Hercule ou le crépuscule d'un dieu masochiste (Mythocritique de la Décadence et de Sacher-Masoch), Champion, (ISBN 978-2745325846)
  6. « Judith, figure biblique de la « veuve noire » », sur The Conversation, (consulté le )
  7. Paul-Laurent Assoun, Le Couple inconscient, Anthropos (ISBN 2-7178-2220-8), p. 120
  8. André Durand, Bajazet, Comptoir Littéraire (lire en ligne)
  9. Paul-Laurent Assoun, Le Couple inconscient, Anhtropos (ISBN 2-7178-2220-8), p. 120
  10. Paul-Laurent Assoun, Le Couple inconscient, Anthropos (ISBN 2-7178-2220-8), p. 122
  11. Paul-Laurent Assoun, Le couple inconscient, Anthropos (ISBN 2-7178-2220-8), p. 122-123
  12. « Lola Montès (1821-1861), maîtresse du chaos », sur Radio France, (consulté le )
  13. Paul-Laurent Assoun, Le couple inconscient, Anthropos (ISBN 2-7178-2220-8), p. 123
  14. Mes Souvenirs. Les boulevards de 1840-1870, Paris, Calmann Lévy, 1884, p. 36.
  15. Charles de Mazade, Une Favorite au XVIIIe siècle - Mme de Pompadour, Revue des Deux Mondes (lire en ligne)
  16. Paul-Laurent Assoun, Le Coup;e inconscient (ISBN 2-7178-2220-8), p. 121
  17. Gilles Deleuze, Présentation de Sacher-Masoch : le froid et le cruel, Les Éditions de Minuit (ISBN 978-2707320100)
  18. Bernard Michel, Sacher-Masoch (1836-1895) (Les hommes et l'histoire), Robert Laffont, , 344 p., p. 47